le retour
Caché sous les couches de vêtements,
invisible à l'inconnu,
Visible que pour moi,
comme un talisman
Des formes géométriques,
Des chaines pour lien,
Des couleurs,
La terre, le ciel, l'eau,
La matière,
La vie,
La force,
Les éléments
Quelque chose d'incroyablement fort,
Une autre dimension
Autre chose
Jamais je n'aurais osé
Et pourtant il était vraiment pour moi
Tu l'as compris
Tu me l'as offert
Pour les beaux jours,
Ne pas lui attribuer plus de pouvoir
Qu'il en a
Et pourtant, c'est lui que j'ai choisi
Pour cet hier si particulier.
la journée s'annonçait compliquée
Un enjeu relativement important
Les souvenirs qui allaient me remonter à la figure
Je le savais
Passage obligé
"comme la première fois où l'on revient sur le lieu de…"
c'était cela, il n'y avait pas de mort,
une séparation par consentement mutuel
une simple vente
pour un ailleurs différent,
plus apaisé, plus pratique, plus urbain
un ailleurs
mon aujourd'hui qui a transformé ma vie
les rencontres, les mots, les amies,
un autre environnement,
tournée la page d'avant
ouvert le nouveau livre à écrire
dehors,
il ne fait pas froid
il ne fait pas chaud
il ne pleut pas
il ne neige pas
il n'y a pas de vent
ni, ni, ni, ni
tiède et tourmentée
angoissée, stressée,
paniquée même
faire la route
cette route qui au fil des années allonge
le temps du voyage
les bâtiments qui poussent inlassablement
au fil du développement économique de la région
l'arrêt pour la énième fois sur cette aire d'autoroute
un sandwich
un café
le voyage reprend
les gerbes d'eau sur l'autoroute
les kilomètres défilent sur le cadran
la température baisse inexorablement
différence entre le bitume et la terre
Huit degrés au départ,
Puis six, puis cinq, et quatre, et l'alarme automatique de la voiture,
La neige est présente, pas encore fondue, les champs blancs et noirs,
comme le pelage d'un zèbre
Il faudra du temps pour que l'hiver disparaisse
C'est la campagne
Trois degrés et un petit demi-degré de rab à l'arrivée
La neige fondante tombe du toit pentu du petit lavoir
En des "flocs" réguliers
Oh ! çà glisse, un peu de verglas,
Le cadenas résiste
Je rentre dans le terrain,
Mon pas s'enfonce,
La terre est humide, froide, grasse, glissante, gluante
Elle happe le pas comme pour te garder
Au printemps les jonquilles ressortiront de cette gangue
Comme un petit miracle
Un mouvement perpétuel
Le grand arbre de Noël qui culmine à … très haut est toujours là
Il a échappé au bras meurtrier du nouvel occupant
Où sont passés, le pin, le pommier, le poirier et tant d'autres essences
Que je chérissais, que j'avais voulu
Les rosiers ont été arrachés, les iris
Il ne reste que les yuccas agressifs
J'y vois une image
Mon cœur est gros
Je ne suis plus chez moi
Je n'ai rien à dire
Je ne dirai rien
Des gens gentils nous accompagnent
Eux, j'aimerais bien qu'ils foulent la terre
Je sais déjà qu'ils l'aimeraient
Qu'ils seraient heureux de croquer une figue, une prune, une cerise ou un cerneau de noix
Chacun son choix
Accueil chaleureux chez nos anciens voisins,
Les portes s'ouvrent,
les grands sourires
Les enfants ont grandi
Le café est chaud, son arome nous enveloppe d'une douce bienveillance
si douce à mon cœur un peu gelé
C'était chez moi
Les tas de cendres de mes bouquins, des meubles… ne sont plus
Chez les uns et les autres, je vois des bouts de chez nous
Nous avons tant donné, tant abandonné des fragments de cette vie
Une brouette, un coffret, des fauteuils, des outils, des tables, des chaises…
Tant de choses,
Je ne peux faire un inventaire
Ce qui est donné est donné
aucun regret
L'herbe est grasse
La neige est encore là
Un rideau de brume commence à monter de la terre
Qui cet été verra le blé pousser
Le petit bois devant mes yeux embués va bientôt disparaître
Il est temps de reprendre la route
Faire le chemin vers le retour
Vers le chauffage, la ville, le cocon,
Sa proximité et ma nouvelle vie
Il n'y a rien à faire
J'ai encore laissé un petit bout de mon cœur
Je ne suis pas complètement guérie
Mais, je sais maintenant que je peux y retourner
Ne serait-ce qu'une fois
Une petite fois
Quand les arbres seront en fleurs
Quand les coquelicots refleuriront
Quand le soleil m'accueillera