et le masque 2
Nouvel ami
contre l'ennemi :
cet horrible virus,
déconfinés,
tu as envahi les rues
salissant les caniveaux.
Il y a peu tu étais signe de fête
sous mille facettes
tu défilais à Venise
pendant le carnaval
tu étalais dans les vitrines
perles et pierreries
aigrettes sublimes
d'or et de lumière,
masque pour Halloween
citrouille, et compagnie
c'était encore la fête
masque de Mardi Gras
c'était encore la fête
masque au concombre
pour la beauté de la peau
masque indonésien
masque africain
souvenirs de voyages lointains
c’était avant
avant cette saloperie.
Maintenant
c’est mascarade tous les jours
un carnaval au vitriol
se protéger
protéger l’autre,
des milliards détruits
mensonge d’état
faire croire qu'ils ne servaient
à rien
avec un aplomb déconcertant,
de toutes les couleurs
de toutes les matières
ils ornent nos visages
pas assez à mon goût
aussi beau soit-il
c'est une misère
un échec cinglant
de la mondialisation
de la cupidité de l'homme
des centaines de milliers de morts
pour un virus sorti de nulle part
ou de quelque part
mais d'où ?
L'homme détruit
il a deux faces
comme Janus,
il sait se réinventer
Inventivité en marche
bretelle d’un soutien-gorge
pour remplacer l’élastique
en rupture sine die
tissu de double rideau
sacrifice de taie d’oreiller
de pyjama
que sais je encore...
Au coin d'une rue :
"ah c’est toi
je ne t’avais pas reconnue ! "
lorsque dehors je vais
pour remplir le frigo
comme maman oiseau
en quête de nourriture pour ses petits
Ai-je tellement changé en
55 jours ?
sous mon masque
je ris jaune
je transpire
c’est le moins pire
il nous fait aussi tomber
j'ai donné
presque un mois
encore de vilains bobos
ce n’est rien
il y a toujours pire
mais, dans la tête
il en reste quelque chose
une tristesse profonde
une douleur à l’âme
qui peut durer
qui va durer
En 55 jours, j'ai pris dix ans
accélérateur du temps.
Il y aura
avant le masque
il y a avec le masque
je rêve de retrouver ma vie
après le masque
sans le masque
être reconnue dans la rue
être reconnue par mon téléphone
qui désormais m'ignore sadiquement
faire un grand sourire
à un inconnu
envoyer un baiser
en attendant
je fais des Z
comme des coups d’épée
dans l’eau
je suis Zorro
je suis à zéro.
Désolation devant ces masques,
colère serait plus juste,
à l’abandon
sur les trottoirs
au pied d’une poubelle
tir raté
tout le monde n’est pas Tony Parker.
Le virus jubile
il a trouvé un terrain de jeu
à sa démesure,
nous en viendrons à bout
la route est longue encore
il faut y croire.
Enfin la clé
dans la serrure
je rentre dans mon hâvre
de sérénité,
mon cocon,
enlever les gants
se laver les mains
poser le masque
enfin je suis moi
la petite chienne me fait la fête
enfin je suis bien
enfin….
c'est mieux que rien
c'est mieux que le pire
c'est mieux que certains
c'est mieux que la mort.
Ce n'est certainement pas ainsi
que j'espérais vivre les dernières années
de ma vie…
je croise les doigts
il faut y croire
"il faut y croire"
me répond l'écho de ma voix.
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photos ERC / DR - HDV Colombes 92700 - incivilité > poubelle & masque indonésien